The world had to be “disenchanted” in order to be dominated.
Silvia Federici, Caliban and the Witch (via goneril-and-regan)
Putting things in perspective: the real size of Africa and other issues as we interview Andres Lepik on his exhibition, “Afritecture - Building Social Change” at the Architecture Museum TU Munich.
http://bit.ly/1dpdaLI
derica:
A lire : BLACK INVISIBILITY AND RACISM IN PUNK ROCK BY TASHA FIERCE http://www.hipmama.com/features/black-invisibility-and-racism-punk-rock-tasha-fierce
Image extraite du film Pumzi de Wanuri Kahiu, 2009
(Article initialement paru le 18 septembre 2012 dans Gaite Live, le magazine de la Gaité lyrique).
Bristol, juin 2012, pour la première fois un centre d’art conçoit une exposition centrée sur les liens entre Afrique et science-fiction et tente de comprendre de quoi ces nouvelles affinités sont le nom.
En 2009, Neill Blomkamp, réalisateur d’origine sud-africaine, petit prodige de la culture digitale et « protégé » de Peter Jackson (le père de la trilogie Le Seigneur des Anneaux), choisit de revenir sur la terre de son enfance, plus précisément à Chiawelo, un des quartiers pauvres du district de Soweto (Johannesburg), pour tourner son premier long métrage. Mêlant habilement les esthétiques du reportage de guerre, du documentaire télé et de la science-fiction, il réalise le film qui, par son succès planétaire, va marquer l’entrée « officielle » de l’Afrique dans l’univers de la science-fiction : District 9.
Il faut sûrement attribuer à District 9 l’attention dont l’Afrique fait aujourd’hui l’objet auprès des cercles d’amateurs de science-fiction. Mais comme tous les phénomènes médiatiques, il a aussi eu comme effet d’occulter la diversité des formes qu’a pu prendre l’émergence de l’Afrique dans cet univers. En témoigne l’exposition « Super power: Africa in Science Fiction » concoctée par le très expérimental centre d’art Arnolfini à Bristol.
Pour les deux commissaires, Al Cameron et Nav Haq, il s’agissait « d’analyser la tendance récente chez certains artistes, basés en Europe ou en Afrique, à prendre le continent comme élément narratif et/ou esthétique d’une fiction spéculative ». L’exposition était enrichie d’une programmation de films, rencontres, débats, conférences qui ouvraient sur les formes multiples et les interprétations complexes d’un mouvement qui en réalité est bien antérieur au film de Neill Blomkamp.
Vue depuis la science-fiction, l’Afrique aurait-elle pour rôle de catalyser les zones d’incertitudes et de turbulences qui naissent entre techno-science, mythologie et imaginaire?
L’anthropologue Louis-Vincent Thomas a mis en évidence que la science-fiction, dans ses fonctions critiques et descriptives, « pourrait bien être la sociologie imaginaire de notre présent ». En effet, à l’heure où les technologies les plus sophistiquées s’élaborent dans les laboratoires des départements de la Défense, la SF semble moins dévolue à imaginer le futur qu’à documenter le réel d’une époque marquée par des mutations d’une amplitude sans précédent. Issue d’une civilisation occidentale qui voit ses idéaux d’omnipotence s’effondrer, la SF aurait-elle besoin de l’Afrique, figure de l’altérité absolue, pour stigmatiser les zones d’incertitudes et de turbulences qui naissent entre techno-science, mythologie et imaginaire?
En 2050, l’Afrique comptera près de 2 milliards d'habitants. La pauvreté et la violence potentielle qui l’accompagne n’aura pas disparu. Concentrée dans les villes et leurs périphéries devenues gigantesques et impossibles à cartographier, elle nourrit les craintes des départements de la Défense américains qui voient dans l’urbanisation du « Tiers monde » « le champ de bataille du futur ». Ainsi dans Tetra Vaal (2004), un des deux courts métrages de Neil Blomkamp présentés dans l’exposition, le robot policier qui se déploie dans le Township emprunte largement au dispositif MOUT (Military Operations on Urbanized Terrain) conçu par le Pentagone pour contrôler les guérillas et la criminalité urbaines et dont certains développements ont été testés à Sadr City, Tijuana et à São Paolo.
Et si District 9 fait référence explicite à l’histoire de l’apartheid avec l’épisode de District 6 et ses spectres, le film met aussi en jeu la puissance médiatique de la fabrique de l’information et sa tendance à construire une image de l’Afrique, irrémédiablement enfermée dans ses tragédies : apartheid, misère, criminalité, xénophobie meurtrière, brutalité policière, expérimentations militaires et biométriques.
« L'actuelle crise mondiale montre que l’Ouest arrive à un point de saturation... Aujourd’hui, l’Afrique est encore endormie, mais elle ne tardera plus à se réveiller et le monde s'en verra transformé au-delà de tout ce que l’on peut imaginer. »
Le projet post-moderne de la science-fiction pourrait aussi être celui de produire de nouvelles visibilités.
Avec ses taux de croissance positifs, ses ressources premières stratégiques, et une population majoritairement jeune, l’Afrique dispose d’atouts porteurs d’une dynamique interne qui font d’elle le continent du futur. Pour Jonathan Dotse, blogger cyberpunk ghanéen,«l’Afrique est la frontière finale. Tous les autres continents ont joué un rôle majeur dans le profilage du monde moderne, à l’exception de l’Afrique dont le potentiel économique, culturel et intellectuel reste majoritairement inexploité. » Contrairement à une idée reçue, le continent n’est pas resté à l’écart de la révolution technologique, scientifique et médiatique. A l’instar de Spoek Mathambo, Neill Blomkamp, Nnedi Okorafor, Lauren Beukes, (les noms qui émergent quand on parle de science-fiction en Afrique), Jonathan Dotse a grandi avec la télévision et les outils technologiques. Dans un article intitulé « Developing Worlds: Beyond the Frontiers of Science Fiction », témoignage sensible et Manifeste pour une science-fiction des marges, il décrit ses premiers émois devant la découverte du genre : « Imaginez un petit africain écarquillant les yeux sur les images granuleuses d’un vieux poste de télévision réglé sur un canal VHF, un enfant qui découvre pour la première fois les images et les sons d'un monde merveilleusement étrange, au-delà des limites de la ville. C'est un de mes plus anciens souvenirs; j’ai grandi au milieu des années 1990, dans un petit immeuble tranquille de Maamobi, une enclave de la banlieue de Nima, un des bidonvilles notoires d’Accra. Mis à part la Société de diffusion gérée par l’Etat, il n’y avait à l'époque que deux autres chaînes dans tout le pays et ma famille n’avait absolument pas les moyens de s’abonner à la télévision par satellite. Néanmoins, à l'occasion, toutes sortes de programmes intéressants venus du monde entier passaient par ces chaînes publiques. C’est ainsi que j'ai rencontré la science-fiction, non pas à travers les ouvrages de grands auteurs, mais à partir d'approximations distillées de leurs grandes visions. »
Et de conclure : « Que se passe-t-il quand la jeunesse du tiers-monde a accès à des technologies qui étaient pratiquement inimaginables il y a quelques années ? Qu'advient-il si cette tendance se poursuit, disons, encore cinquante ans ? Qui est censé répondre à ces questions ? Les écrivains de science-fiction, bien sûr! »
De ces « recoins oubliés de la planète » émerge un nouveau genre dans lequel le local compose avec les codes de l’ultra modernité globalisée, la magie avec la haute technologie.
Si District 9 ou Pumzi s’inscrivent résolument dans la tradition du film d’anticipation, les productions africaines de science-fiction tentent aussi de marquer leur spécificité, notamment en se réappropriant la culture du rapport au surnaturel et au savoir magique. « Zoo City » de l’écrivaine Lauren Beukes, en est l'exemple le plus médiatisé. Edité en juin 2010, ll a obtenu l’année suivante le prestigieux prix Britannique Arthur C. Clarke du meilleur roman de Science fiction.
L’auteure se sert de la spécificité de Johannesburg, vue de Hillbrow, le quartier réputé le plus dangereux de la mégalopole, pour construire une fantasy urbaine chaotique, schizophrène et hallucinée. Sans complexes se côtoient les usages des technologies numériques et du savoir mystique dans une société qui réinvente son rapport à la nature en attribuant aux criminels (plus nombreux qu’on ne le pense) un animal symbiotique conférant à son maitre un pouvoir magique.
Autre exemple : Les Saignantes, du réalisateur camerounais Jean-Pierre Bekolo (2005). Dans le film le mevungu (association secrète de femmes qui pratiquent un rite purificateur des vols et adultères) est régulièrement évoqué par une discrète voix off féminine.
Comme l’esquissent les deux commissaires de l’exposition, ne serait-ce pas l’Afrique qui serait la grande gagnante de ces emprunts à la science-fiction? Enfin libre de dessiner les contours de sa propre modernité, elle aurait trouvé dans la science-fiction, ce nouvel «espace autre» défini par Michel Foucault, une hétérotopie dont la fonction serait d’être un formidable réservoir d’imaginaire pour élaborer son futur.
Oulimata Gueye
"I have tried to suggest that precarity is the condition against which several new social movements struggle. Such movements do not seek to overcome interdependency or even vulnerability as they struggle against precarity; rather, they seek to produce the conditions under which vulnerability and interdependency become liveable. This is a politics in which performative action takes bodily and plural form, drawing critical attention to the conditions of bodily survival, persistence and flourishing within the framework of radical democracy. If I am to lead a good life, it will be a life lived with others, a live that is no life without those others. I will not lose this I that I am; whoever I am will be transformed by my connections with others, since my dependency on another, and my dependability, are necessary in order to live and to live well. Our shared exposure to precarity is but one ground of our potential equality and our reciprocal obligations to produce together conditions of liveable life. In avowing the need we have for one another, we avow as well basic principles that inform the social, democratic conditions of what we might still call ‘the good life’. These are critical conditions of democratic life in the sense that they are part of an ongoing crisis, but also because they belong to a form of thinking and acting that responds to the urgencies of our time."
"Can one lead a good life in a bad life?" Judith Butler, Adorno Prize Lecture.
Cristina De Middel photojournaliste de formation, a choisi il y a quelques années de quitter le domaine strictement journalistique pour raconter des histoires avec ses photos et s'applique à brouiller les pistes entre réel, fantastique et fantaisiste. En 2012, la série "Afronauts" —interprétation personnelle du projet du zambien Edward Festus Makuka Nkoloso d'envoyer une navette spatiale sur la lune avant les Américains et les Russes—, lui confère une rapide notoriété. En 2013, invitée par le Lagos Photo Festival, elle s'appuie sur le célèbre roman du Nigérian Amos Tutuola, "Ma vie dans la brousse des fantômes" pour réaliser une série de portraits des habitants de Makoko, un quartier pauvre à la périphérie de Lagos.
De passage à Paris, pour le salon Paris Photo, Cristina De Middel nous présente sa démarche dans laquelle science-fiction et Fantasy tentent de déplacer le champs des représentations de l'Afrique.
Voir les photos de "This is what hatred did" sur le site du Lagos Photo Festival
Oulimata Gueye
Jeudi 17 octobre 2013, 18.00-20.00 - Salle D02, Université Paris 8 Saint-Denis.
C’est une rencontre intéressante car Achille Mbembe vient présenter son dernier ouvrage au Laboratoire des Théories du Politique de l’Université de Paris Saint-Denis et discute avec trois chercheurs importants qui interrogent sans cesse la marge et l’ailleurs pour décortiquer les mécanismes politiques économiques et sociaux à l’œuvre dans la société française contemporaine.
"Of whom and of what are we contemporaries? And, first and foremost, what does it mean to be contemporary?" Giorgio Agamben, Qu’est-ce que le contemporain?, Paris, Rivages, 2008. Photo: Icarus 13, Kiluanji Kia Henda
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